Comment fermer les portes à la concurrence quand on est prestataire de services ?

Il y a des prestations de service qui, quoi qu’on en dise, sont éminemment substituables et qui sont donc des portes ouvertes à la concurrence.

Et c’est particulièrement vrai pour les prestations de mon expert-comptable*. Car rien ne ressemble plus à un bulletin de paye qu’un autre bulletin de paye, et une déclaration 2035 à une autre déclaration 2035. Et ne me dites pas non, c’est les clients qui nous le disent ! * Mais aussi dans notre métier des études dans une certaine mesure.

Facile me direz-vous de « verrouiller » un client ! Et pourtant, quels sont pour vous les facteurs clés de fidélisation d’un client ?

·        L’accompagnement conseil ? Une fois par an pour découvrir la vérité des comptes ? Deux fois par an ?

·        Un tableau de bord régulier de présentation des charges avec comparaison avec les années précédentes ?

·        Ou des comparaisons avec la concurrence ou la filière ?

·        Des messages d’alerte sur des comptes plus sensibles ou sur des dérapages de charges ?

·        Des échanges réguliers sur un compte d’exploitation provisoire ?

Nous ne connaissons pas la réponse… seuls les clients la connaissent.

Poursuivons… nous venons de lister un petit nombre de prestations d’accompagnement susceptibles d’éviter l’intrusion concurrentielle.

Mais qu’est-ce que le client est prêt à payer pour cet accompagnement ? Que considère-t-il comme faisant partie intégrante de la prestations achetée/convenue ?

Tout prend du temps et a un coût ! Faut-il revoir la tarification des services ? Au risque de ?

Poursuivons encore… qu’en est-il de la relation ?

Celle intuitu personae, en lien avec le ou les interlocuteurs du client ? Celle qui lie le client à la marque de votre entreprise ? Les deux ? (Nous en reparlerons dans un prochain article).

Ce que nous savons par expérience, c’est que tous les clients ont « horreur du vide » et que l’absence de relation « terrain » ouvre les portes à la concurrence.

Il faut surtout anticiper pour savoir. Interroger les clients par vous-même sur ces sujets sensibles est compliqué, sauf à ce que l’intimité client soit très développée…

Et ce que nous constatons dans les enquêtes que nous conduisons, c’est que la satisfaction client est loin d’être optimale… tant sur le contenu que sur la relation.

Des solutions existent, parfaites ou imparfaites, il faut allez les chercher.

A votre disposition pour échanger.

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Le politiquement correct, c’est la mort de la pensée… et des études marketing (mais pas que) !

Le choix des mots pour le dire

D’une manière générale, l’emploi le plus juste possible du vocabulaire, de la grammaire et de la syntaxe est essentiel : inutile de nous cacher derrière des mots vidés de leur sens par mode ou par convention, ce qu’on appelle aujourd’hui, non sans raison, le « politiquement correct ».

Dans les études marketing

Notre rôle en tant que directeur d’études qualitatives n’est pas de faire plaisir ou de déplaire, même si certaines analyses sont très plaisantes à entendre et d’autres totalement déplaisantes : il est d’énoncer des réalités avec les mots qui ont un sens.

Alors le choix des mots devient crucial. Car plus le langage est pauvre, moins la pensée existe ; et pas davantage de pensée critique sans pensée. Et pas de pensée sans mots.

Nicolas Boileau disait, dans l’une des versions rapportées, « ce qui se conçoit bien, s’énonce clairement, et les mots pour le dire viennent aisément ».

Comment vide-t-on le sens ?


Quelques exemples choisis pour comprendre comment on vide le sens des mots.

Prenons les expressions les plus usuelles trouvées dans les études, vocabulaire généralement emprunté au client qui agit sous la pression du « politiquement correct ». Deux mots sont souvent employés : « enchantement » et « irritant ». La raison en est simple : il faut être soi-disant bienveillant et j’y reviendrai bien évidemment car ces deux mots employés respirent de manière illusoire la bienveillance.

Quand un client commandite une étude qualitative, c’est avant tout une marque de confiance. Il nous confie le soin d’interroger une partie de sa clientèle pour entendre de manière neutre ce qu’elle a à dire, à la fois de bien et de moins bien, voire de très pénible à entendre.

Notre rôle est alors de lui rapporter des réalités, telles que ses clients les vivent.

Pour ce faire, nous avons trois missions :

1- Poser les questions les plus pertinentes, voire même impertinentes, pour faire surgir les réalités des propos des clients ;

2- Reformuler pour démêler un éventuel « vrai du faux » et/ou éviter toute interprétation des propos ;

3- Rassembler ce qui est épars, rapporter et analyser les propos des clients en leur donnant du sens.

Sachant que la vérité est par essence indicible, il nous appartient de répercuter les réalités avec deux atouts :

· Produire une analyse sans fard avec les mots les plus explicites ;

· Soutenir notre analyse avec un maximum de verbatim (reproduire les mots du client).

Revenons à nos deux mots : L’enchantement

Deux définitions dans le Larousse : je passe sur la définition littéraire « un pouvoir magique s'exerçant …. » pour la seconde définition : état d'âme de quelqu'un qui est charmé, soit un sentiment qui attire quelqu’un par quelque chose de singulier ou mystérieux.

Un état d'âme est relatif à une humeur, à un sentiment donc sous le charme, c’est-à-dire un attrait.

Charme, attrait, sentiment, voilà bien des mots éloignés des réalités du quotidien du client en BtoB. Et j’imagine mal mes clients dans l’industrie du bâtiment, de la défense, de la chimie, être un instant « sous le charme » de la gamme de produits qu’ils achètent, ou pire de la relation qu’ils entretiennent avec les responsables commerciaux du fournisseur.

Que voilà un mot mal employé pour dire qu’un client est content ou satisfait, d’autant qu’il est très facile de mettre des adjectifs en préfixe pour graduer satisfaction ou contentement…

Irritant !

Deux définitions : « Qui met en colère, qui cause une irritation » ou « Dont on ne peut venir à bout et qui provoque de l'impatience » sachant que le mot « irritation » exprime : « État de quelqu'un qui est irrité, en colère ». Le mot voudrait donc dire que le client est à un stade ultime de son insatisfaction et qu’il le manifeste par la colère, le problème ne pouvant être résolu ».

En fait, il n’en est rien, bienveillance oblige, l’irritant n’est qu’une « inflammation légère du client ».

Quelle « pommade » faut-il alors prescrire au client ?

Un bref tour dans la sphère privée pour me faire mieux comprendre

Si l’épouse d’un de mes amis est irritée, aux dires de son mari, et qu’elle demande à me voir, il m’importe de savoir et de comprendre s’il s’agit d’un mouvement d’humeur passager chez elle ou d’une volonté plus ou moins éloignée de rupture. Quelle est donc la réalité des faits ou des sentiments si on veut entrevoir le début d’une vérité dans le mot « irritée » ?

Retour à nos affaires

Il en est de même chez les clients et leurs clients : l’insatisfaction est-elle passagère, partielle, définitivement proche d’une rupture ? Il nous faut le savoir pour le dire avec les mots qui conviennent dans l’esprit de ce que les clients nous disent. Et il y a un monde dans l’univers de la relation professionnelle entre une insatisfaction réelle, passagère et facile à éliminer, et un client sur le point de passer à la concurrence : un seul mot peut-il tout résumer ?

De la même manière, on tend à vouloir gommer une satisfaction moyenne, ou la note moyenne, alors qu’elle est le reflet d’une satisfaction sur certains sujets, et d’une insatisfaction sur d’autres. Et comme nous le savons tous, rien n’est blanc ni noir, mais tout est affaire de nuances. Notre rôle est alors d’éclairer ces nuances et non de forcer le trait sur un tout blanc ou un tout noir. La moyenne cache, les écarts révèlent.

Autre exemple « phare » de mot vidé de son contenu et qui orne maintenant tous les mails « cordialement » :

deux définitions possibles :

· D’une manière cordiale : du fond du cœur, dans tout l'élan de la vie morale la plus intime ;
· Avec (une chaleureuse) amitié.

Dans les deux cas, le mot indique une proximité relationnelle qui peut être tant amicale qu’intime.

Adresser un « bien cordialement » à une femme que vous connaissez peu ou pas n’est donc pas le mot le plus adéquat pour qualifier votre relation épistolaire, et à un homme pas davantage (que vous soyez homme ou femme d’ailleurs).

Les quasi-synonymes sont : franchement, loyalement, ouvertement, sincèrement, spontanément.

Permettez-moi de le remplacer par « sincèrement », cela traduit davantage le fait que ce que vous écrivez est fait avec sincérité et/ou avec franchise.

Les raisons d’un langage impropre

Pourquoi tout cela ? Eh bien c’est une affaire de bienveillance mal ordonnée. Mot à la mode, la bienveillance est mise à toutes les sauces en particulier sur les réseaux sociaux. Pourquoi ? Parce que l’on confond probablement à dessein, bienveillance et gentillesse.

La bienveillance, comme son nom l’indique, c’est veiller à faire le bien. Ce n’est pas faire « du bien » mais le bien.

La gentillesse se définit comme : « Qualité, comportement habituel, fait de délicatesse, de prévenance ». C’est par ce mot qu’on signifie « faire du bien » avec délicatesse et prévenance.

L’un ne s’oppose pas à l’autre : le premier traite du fond, le second de la forme.

La bienveillance, c’est donc la capacité à dire, à affronter des vérités et certainement pas à les cacher.

Quand nos gamins s’écartent du droit chemin en termes de comportement ou de résultats scolaires peu flatteurs, la bienveillance ne consiste pas à les protéger ou à les excuser, mais à leur faire comprendre avec les mots choisis, et sans violence inutile, ce qu’il conviendrait de faire et de modifier en termes de comportements ou de travail, même si les mots peuvent ou doivent parfois heurter pour réveiller les consciences.

De même, l’évaluation annuelle d’un collaborateur doit être empreinte de bienveillance : elle est faite pour dire clairement les choses et instituer un rapport sain entre un manager et son collaborateur. Cacher, c’est reculer pour mieux sauter ; cacher, c’est entretenir une illusion malsaine chez un collaborateur. Plus on recule devant la vérité, plus elle va exploser à la figure de ceux qui la cachent et de ceux à qui on doit la dire… c’est ne rendre service ni à l’un ni à l’autre, c’est être tout sauf bienveillant. Ne pas affronter ces réalités ou vouloir les cacher sous un matelas de complaisance ou d’une gentillesse en l’espèce mal appropriée, est synonyme d’abandon ou de laisser faire, et non de bienveillance !

« Donner le baccalauréat », pour à l’étage du dessus, mettre un examen d’entrée à l’université fait partie de ce laissez-faire ou de cet abandon qui va consister à retarder l’échéance : celle d’être confronté à sa propre médiocrité, à son absence de travail, à cette lâcheté : piètre mesure s’il en est !

La bienveillance, c’est la capacité à se mettre dans la réalité et à la dire avec les mots choisis : les mots pour dire le vrai, les mots qui ne sont ni blessants ni violents, car la bienveillance c’est aussi la nécessité d’un dialogue et donc d’une porte ouverte à « l’autre ».

La bienveillance, pourquoi faire et pour faire quoi ?

Pourquoi faire ou pour quelles raisons ?

Être bienveillant, c’est la volonté de respecter l’autre, c’est autre chose que l’empathie, c’est le respect de la personne à qui l’on s’adresse et qui mérite d’entendre une vérité ; la bienveillance en ce sens est synonyme de respect. On pourrait en dire davantage.

Et pour quoi faire ou pour quels résultats ?

La bienveillance c’est aussi la volonté de cueillir les fruits d’une relation saine et sans tromperie avec les autres : c’est avoir « la capacité à se dire », comme à s’engueuler sans violence aucune d’ailleurs. La bienveillance génère un terrain relationnel sans chausse-trappes. Là aussi on pourrait en dire davantage.

Mais les points essentiels sont les mots réalités et vérités.

La Covid 19 ne va pas changer le client : il a toujours horreur du vide : comment le combler ?

L’éloignement dans la relation crée de fait un vide... l’assertion est vraie dans la sphère privée autant que dans la sphère des affaires...

Les périodes récentes de confinement mettent en exergue le besoin quasi-physique de se voir et d’échanger en face à face, et donc d’un niveau d’échanges plus « complet » qu’une simple conversation par téléphone ou dans une moindre mesure via un outil de visioconférence.

La question que l’on peut se poser est : où est la différence ? Sur le contenu ? Sur la forme ?

Si 70% du comportement humain est dans le non-verbal, cela pose quelques interrogations :

·         Le téléphone est-il le média préféré du menteur ?

·         La visioconférence  avec deux personnes peut-elle valablement se substituer au face à face ?

·         La visioconférence à plusieurs peut-elle valablement remplacer une réunion ?

Tentons de répondre à ces trois questions :

Sur le téléphone : évidemment aucune possibilité de détecter un comportement corporel qui viendrait trahir sous une forme ou une autre le propos de votre interlocuteur. Mais si mensonge il y a, c’est dans le contenu du discours qu’il se loge ; un acteur commercial habile, s’il a le moindre doute, saura relancer son interlocuteur pour creuser le sujet et valider ou invalider le propos initialement tenu. La méconnaissance du métier et du secteur d’activité est une première barrière, une forme d’intimité client permettrait aussi des formes d’interrogation plus « directes » ou « provocatrices » de celui-ci.

Sur la visioconférence  à deux : c’est indubitablement mieux que le téléphone. Si la relation est ancienne, il y aura peu de filtres et le comportement corporel pourrait révéler la pensée de l’interlocuteur. Mais est-ce substituable à une relation de face à face ? La réponse est pour partie dans l’ancienneté de la relation. Si vous connaissez l’interlocuteur de longue date, il y a peu de différences, vous vous connaissez suffisamment et même l’échange téléphonique pourrait se suffire, si ce n’est le plaisir de se voir et d’échanger... Il y a peu de différences avec le téléphone en termes de contenu. Si vous ne le connaissez que peu ou pas, il faudra passer par les phases de découverte réciproque telles qu’elles existent dans la relation en face à face.

Sur la visioconférence à plusieurs : c’est une conduite de réunion. Sans être mauvaise langue, peu d’animateurs savent réellement conduire une réunion en présentiel, qu’elle soit de type informative ou de type « prise de décision »... avec le lot usuel de frustrations : sentiment d’inutilité, impossibilité de prise de parole, réunion sans fin, ordre du jour non respecté ou à moitié traité. La multiplicité des réunions, dont à peu près tout le monde se plaint, ne va pas se résoudre avec la visioconférence. Sous réserve d’une conduite de réunion maîtrisée, nous nous retrouvons dans le même schéma que dans la visioconférence à deux : si connaissance ancienne, dans le cas d’un client de longue date par exemple, les langues se délient plutôt facilement ; si connaissance récente et externe, retour aux phases de découverte de la visioconférence. Notons aussi que les relations ou réactions à l’intérieur du groupe sont de fait moins perceptibles et de manière partielle.

Alors finalement que manque-t-il ?

Eh bien, dans la relation en face à face, il y a un « avant » et un « après », voire même un « tout le temps », qui permettent, mais pas toujours, d’installer une forme d’intimité ou de proximité avec le client et d’aborder des sujets plus personnels ou généraux qui n’ont aucun rapport avec la relation professionnelle. S’il y a « relation » c’est même une boucle vertueuse. S’il n’y a pas « relation », cela reste au stade d’un simple contact.

Il y a donc quelque chose d’un peu intangible qui permet de passer d’un état (le contact) à un autre état (la relation) et qui installe un degré de confiance qui ne supprime pas le besoin de la rencontre de face à face mais qui permet de s’y substituer temporairement. Cet intangible, c’est à la fois le lien social, affectif et psychique. Et il est illusoire de penser qu’un mode de communication à distance (visio ou téléphone) puisse s’y substituer.

Faites-vous le même constat ? Dans vos relations personnelles comme professionnelles ?

Quand la technologie se heurte au « mur de l’humain », elle montre rapidement ses limites... objet d’un prochain post.